Sorry, you need to enable JavaScript to visit this website.

24/11/25

Cédric Van Hoye, l’art de cuisiner durablement

Read the article

Bonjour Cédric, pourrais-tu te présenter pour nos lecteurs ? 

Je m’appelle Cédric Van Hoye, j’ai 27 ans. J’ai étudié à l’école hôtelière, à l’Atelier Provincial de Namur. Je travaille depuis maintenant sept ans dans le restaurant étoilé « De Jonkman », où j’épaule le chef Filip Claeys, en tant que sous-chef. Pour moi, cuisiner, c’est partager ma passion, faire vivre une expérience aux gens. Comme certains font du sport pour le plaisir, je cuisine pour le plaisir et avec le cœur. 

 

Ton grand-père était un grand passionné de cuisine et il t’a profondément inspiré. Peux-tu nous partager un souvenir marquant en cuisine avec lui ? 

Depuis mes 12 ans, j’adore cuisiner. C’est vrai que ça vient surtout de mon grand-père qui était un amoureux de la cuisine. Aux fêtes de fin d’année, il préparait toujours quelque chose de spécial : une soupe à la queue de bœuf, son propre foie gras, du caviar… C’était toujours la fête avec lui. Pendant les vacances d’hiver, on partait skier, et j’attendais le soir avec impatience pour le rejoindre en cuisine. Je dois dire que ma passion pour la cuisine vient aussi de mon père qui préparait le repas tous les soirs. Tout petit, je l’aidais à éplucher les carottes ou les pommes de terre et j’adorais ça. 

 

Tu as eu l’occasion de faire des stages dans de très belles maisons. Parmi elles, l’ancien restaurant « Pastorale » à Anvers, dirigé par le chef doublement étoilé Bart De Pooter. Qu’as-tu retiré de cette expérience ? 

C’était une super expérience, très formatrice. J’y ai appris la discipline, la ponctualité, le sérieux. J’ai également beaucoup appris grâce à son chef exécutif, Sébastian Sandor, qui insistait énormément sur la pureté des saveurs. Je me souviens que nous avions travaillé sur un plat autour des champignons et des pois chiches : une sorte de crêpe à base de farine de pois chiches, avec un houmous de persil et de pois chiches, le tout accompagné de champignons. Ces associations m’avaient bluffé. 

 

A ton arrivée chez « De Jonkman », tu as débuté en pâtisserie et même si tu es aujourd’hui sous-chef, tu gardes un attachement particulier à cet univers et proposes encore régulièrement des idées. Qu’est-ce qui te plaît tant dans l’art de la pâtisserie ? Y a-t-il un dessert que tu as imaginé dont tu es particulièrement fier ? 

J’ai effectivement commencé à la pâtisserie : mon premier poste à moi seul ! C’était un vrai terrain d’expression : je pouvais proposer des idées à Filip et il décidait si on les testait ou non. J’ai par exemple créé un dessert autour de la pomme et du caramel : des Jonagold confites avec de la vanille, de l’anis étoilé, de la cannelle et des épices hivernales, accompagnées d’un caramel façon dulce de leche et d’une glace au caramel, le tout rafraîchi par un milkshake de Granny Smith. 

J’aime beaucoup la pâtisserie car il faut être minutieux, précis, tout doit être pesé parfaitement. C’est aussi un héritage de mon père, qui adore les douceurs comme moi. À la maison, on faisait souvent des gâteaux ou des biscuits ensemble. 

 

Comment décrirais-tu ton chef, Filip Claeys, dans le quotidien du travail ? Qu’est-ce que tu admires le plus chez lui ? 

Filip, je le vois comme un chef exigeant mais juste. J’ai énormément de respect pour lui, notamment pour sa vision sur le poisson et les produits locaux. C’est un chef créatif, avec beaucoup d’idées et surtout très à l’écoute de son équipe. Pour moi, c’est un peu une figure paternelle en cuisine. Sa grande force, ce sont ses sauces. C’est impressionnant de le voir travailler sans recette écrite.  Il assemble tout et à la fin, c’est toujours une sauce parfaite qui sublime le plat. 

 

Tu as assisté à plusieurs Masterclass S.Pellegrino, notamment aux côtés des chefs étoilés David Martin, Giovanni Bruno et Eric Fernez. Quels souvenirs gardes-tu de ces moments de partage ? Qu’est-ce que tu as appris ? 

On y rencontre des chefs, on voit leurs cuisines, leurs recettes, ils partagent tout. C’est super enrichissant, surtout pour échanger entre jeunes cuisiniers. Une fois, il y avait une masterclass italienne avec deux chefs, Giovanni Bruno et Ilario Mosconi. Tous deux ont fait un risotto d’une manière complètement différente, selon leur région. Résultat : deux plats délicieux mais des textures et des goûts totalement différents. C’était fascinant. Avec Filip, on a aussi donné une masterclass S.Pellegrino, où on a expliqué notre philosophie autour du poisson. C’était chouette d’être de l’autre côté, de transmettre à des jeunes chefs.  

 

J’imagine que tu connais la « S.Pellegrino Young Chef Competition ». Est-ce que cette aventure te tente ?  

J’aimerais beaucoup y participer dans les prochaines années. Ce serait une expérience unique, l’occasion de rencontrer des chefs du monde entier et de faire connaître mon travail à un plus large public. 

 

Comment décrirais-tu ta cuisine aujourd’hui ? Quelles sont tes principales influences ? 

Ma cuisine est assez simple : je veux des saveurs pures, pas trop de chichis ni de décorations inutiles. Je m’inspire beaucoup de mes voyages. En Espagne, à Formentera, j’ai découvert des plats qu’on ne trouve pas ici, comme des calamars frits hyper frais. J’aime aussi m’inspirer de l’Asie : mon meilleur ami développe un restaurant aux influences asiatiques à De Haan, et quand je vais l’aider, je découvre des produits comme la sauce soja, le mirin, le dashi… Des goûts acides, umami, qui s’intègrent bien dans ma cuisine. 

 

Filip Claeys a fondé l’association « North Sea Chefs », qui valorise la pêche locale et durable, tout en garantissant une rémunération équitable aux pêcheurs. Comment s’est passé ta découverte de l’univers de la pêche? 

Avec les  « North Sea Chefs », j’ai découvert tout un univers. À l’école, on ne travaillait que le saumon, la sole ou le turbot. Mais grâce à eux, j’ai découvert d’autres espèces, appris à les préparer et surtout, j’ai appris l’importance de la pêche durable. J’ai compris qu’on devait cuisiner ce que les pêcheurs ramènent et pas seulement ce que le client demande. Il faut aussi valoriser tout le poisson, du filet aux arêtes pour les sauces. C’est essentiel, surtout aujourd’hui où tout coûte si cher. J’ai aussi beaucoup de respect pour les pêcheurs. Leur rythme est dur : toutes les deux heures, ils remontent les filets, jour et nuit. C’est admirable. C’est ce qui m’a donné envie de rejoindre l’association. Je vis à Bruges depuis que je travaille ici. C’est une ville magnifique, une sorte de petite Venise belge. Et en plus, on est tout près de la côte et du port de Zeebruges où il y a la criée. C’est un vrai privilège de travailler avec du poisson aussi frais chaque jour. 

 

As-tu envie d’ouvrir ton propre restaurant un jour ? Comment envisages-tu la suite de ta carrière ? 

Pour l’instant, je suis très heureux chez « De Jonkman ». Filip me fait confiance, j’ai beaucoup de liberté. Mais d’ici quelques années, j’aimerais travailler encore deux ou trois ans ailleurs avant d’ouvrir mon propre établissement. Ca ne sera pas forcément une table étoilée mais je rêve d’un restaurant avec une petite cuisine, une petite salle, pas trop de clients, mais des menus et une carte à base de produits frais et de saveurs franches.